Ce mois-ci, l’U-Prog nous propose d’étudier le cas d’un naturalisé. L’occasion pour moi de vous parler d’Alfred, dont le parcours très détaillé nous est conté grâce à son dossier de naturalisation, mais également à son dossier du « fonds moscou ».
Alfred, un émigré belge
Alfred est né en Belgique, dans la province de Hainaut, à Godarville le 12 juin 1908. Il est le fils de Jules houilleur, et Marie Thérèse.
Conçu hors mariage, il nait à peine 7 mois après le mariage de ses parents.
En février 1910, ses parents émigrent en France, s’installant à Jeumont dans le Nord. Son enfance n’est pas heureuse. Seul enfant du couple, il voit régulièrement son père s’alcooliser, et battre sa mère. C’est ainsi qu’en 1926, il assiste à un drame : son père tire au revolver sur sa mère, la blessant gravement au cou. Jules écopera de 8 ans de prison avant de disparaître dans la nature.
Alfred intègre les Ateliers de Constructions Electriques de Jeumont. En 1928, il retourne en Belgique pour son service militaire. A son retour, il déménage à Albert, et intègre l’usine d’Henri Potez, constructeur aéronautique.

Il rencontre Blanche, célibataire qui a une fille de 4 ans. Le 18 Mars 1931, Alfred et Blanche se marient. La petite est légitimée.
Mais Alfred reproduit ce qu’il a toujours vécu, il bat sa femme, et boit. Il fait même de la prison pour cela, et recevra un « sévère avertissement »
Blanche finie par demander le divorce, qui lui sera accordé en Mai 1937. Elle rejoindra la maison de ses parents, et il continuera sa vie.
Lors des élections cantonales d’octobre de 1937, en colère face au résultat des urnes, Alfred et quelques autres descendent dans la rue et provoquent quelques dégâts. En tant qu’étranger, Alfred n’est pas censé montrer ses idées politiques, et se doit de garder une neutralité face à de tels événements. Un second avertissement lui sera adressé.

Le préfet rédige un avis d’expulsion. Il doit quitter le territoire sous 8 jours.
Etre naturalisé
Mais, Alfred conte fleurette à une jeune institutrice, tout juste mutée de son Calvados natal. Il espère pouvoir se marier avec elle, et demande un sursis d’un mois à la préfecture avant son expulsion.

Il ne se mariera jamais avec la jeune institutrice, de nouveau mutée dès 1938. Mais il continue de demander des sursis, pendant près de 8 ans…
La guerre éclate, comme beaucoup devant l’avancée rapide de l’ennemi, il évacue. Ses compétences en industrie lui permettent de trouver rapidement un emploi à Toulouse, chez GSP, un spécialiste de la construction de grosse machinerie. Il n’y restera que quelques mois avant de retourner à Albert pour travailler chez DOUZILLE, un constructeur métallique. En fin d’année, il sera affecté comme ouvrier spécialisé chez la SNCAN, anciennement usine Henri POTEZ qui a été nationalisée quelques années plus tôt (Société Nationale de Construction Aéronautique du Nord).

Alfred rencontre Jeanne, fraichement divorcée. Ils se marient en février 1943.
Les années d’occupations passent, c’est la libération.
Début juin 1947, Alfred constitue son dossier de naturalisation, d’abord en récupérant son certificat de travail, puis un certificat médical indiquant qu’il est en bonne santé physique et mentale. Quittance de loyer et interrogation des impôts rejoignent le dossier. Il dépose ainsi la déclaration sollicitant la nationalité française en Août de la même année.
S’en suive des échanges entre la préfecture, les services de renseignements de police, et la mairie d’Albert.

La naturalisation d’Alfred reçoit un avis favorable par la préfecture en janvier 1948.
Le décret du Journal Officiel indiquant qu’Alfred est naturalisé français parait le 28 Novembre 1948



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