Voici un sujet difficile que nous propose ce mois-ci l’UPro-G : “un curé blogueur”.
Au-delà de l’anachronisme flagrant, nous pouvons nous interroger sur les obligations de rédaction d’acte de baptême, mariage et sépulture. En effet, alors que l’état civil post-révolutionnaire oblige la rédaction des actes selon des formules précises et froides, tel un robot répétant encore et toujours les mêmes mots, le curé va parfois nous livrer des détails truculents ou sordides sur la vie de ses paroissiens.
Il n’est alors pas rare de croiser dans le registre une sage femme ayant baptisé un enfant en difficulté. Et que dire des morts violentes, suite à des maladies ou à des noyades ?

La création d’un nouveau nom de famille
Les archives départementales de la Somme nous proposent le registre paroissial de Camon, immatriculé 5MI_D281, contenant l’acte suivant :

Le seizième jour de septembre mil sept cent dix / sept par moÿ curé de la paroisse de Saint Vast / de Camons les Amiens, soussigné a été baptisé un / garcon fils de Jeanne Bridelle et dont laditte / Bridelle ne connoit pas le pere ayant été prise a la / force par (?) particulier (?) entre Cardonette et Molliens / au bois environ le fossé Monette ainsy que ladite / Bridelle m’a asseuré et juré. Lequel est né le / quinze desdits mois et un. Son parein a été Francois / Guerard et sa mareine Marie Anne Dumont / quy luy ont donné le nom de Pierre Monette et ont / signé avec moy le present acte le jour etan susdit
La vie de Pierre MONETTE
Pierre se marie le 29 Novembre 1748 avec Marie Anne CAUET, dans la commune de Arquèves, à une trentaine de kilomètres au nord de Camon. Fait intéressant dans cet acte, il y est précisé le nom d’un père… Pierre MONETTE, décédé. Alors, ajustement de la vérité par la famille de l’époux? Ou bien n’était-il pas au courant de sa conception, mensonge par sa mère pour le protéger? Ou y a-t-il eu un véritable mariage avec un Pierre MONETTE?

Le vingt huitième novembre 1748 je curé d’Arqueves / soussigné au marié solennellement Pierre Monete agé de / trente et un an fils de feu Pierre Monete et de feu Jeanne / Jeanne Bridelle / de la paroisse de camon d’une part et Marie Anne Cauet âgée de / vingt cinq ans fille de Jean Cauet manouvrier et de défunte Marie Lombard sa / femme d’autre part. Après quels bans ont été publié en cette église selon l’usage/ et en celle dudit camon et sans quil apparue aucun oposition. Aussi les / fiancailles célébrées lequel mariage s’est fait en présence de Jacques Martelot, d’Antoine Guerart ses cousins, / d’Antoine Guilbert son beau frère, d’Augustin /Bocquillon (tache) et ont les parties et témoins susnommés singés avec /moy cy jour et (tache) excepté Marie Anne Cauet qui a dit ne savoir écrire
Les mariages de Jeanne BRIDELLE
Jeanne se marie le 10 Juillet 1703 avec Noël GUERARD, âgé de 28 ans environ. Elle est âgée d’environ 24 ans.
Ce mariage intervient quelques mois après le décès de la première femme de Noël, Marie … BRIDELLE, avec qui il a eu un fils, prénommé François, comme le parrain de notre Pierre MONETTE ! Curieuse coïncidence n’est-ce pas?
Noël GUERARD (ou GRARE / GRARD selon les actes) est sans doute décédé en 1713, à l’Hôtel Dieu d’Amiens.
Jeanne, se remarie en 1725, avec Nicolas DOMONT, également veuf.
Elle décédera le 24 Octobre 1747. Son acte de sépulture donne nous indique quelle était veuve de Nicolas DOMONT.
Nous pouvons donc conclure que l’acte de mariage de son fils, Pierre MONETTE est erroné, du moins sur le nom de son père.
Et après 1748 ?
Pierre et Anne Marie ont eu 3 enfants, nés en 1750, 1752 et 1754, prénommés Anne, Pierre et Jean Baptiste.
Pierre exerce plusieurs métiers, tel coquetier (vendeur d’œufs), marchand de veaux, et même fusilier auprès des Grenadiers et Fusiliers Royaux et Postiches pendant la Guerre de Sept Ans, et petite joie, le registre d’enrôlement nous permet d’imaginer un visage à notre Pierre MONETTE!


Chose surprenante, ses deux fils Pierre et Jean Baptiste alors âgés de 5 et 3 ans apparaissent sur les registres d’enrôlement ! Anne Marie et ses enfants auraient ils suivi Pierre à la guerre ? Ce fait n’est pas une chose rare au 18e siècle, notamment par manque de moyen financier pour subsister pendant l’absence d’un mari.

Le nom de famille a-t-il était transmis?
Sur les 3 enfants nés à Arquèves du couple de Pierre et Anne Marie (ou Marianne selon les actes), nous pu retracer la vie de Anne, mariée en 1786 à Georges BOUCHER, et trouver l’acte de sépulture de Jean Baptiste (décédé en 1776). Reste manquant la vie de Pierre MONETTE Fils.
Au décès de Pierre et de Anne Marie, il n’est pas précisé la présence d’un fils, ou d’un autre enfant. Seule la succession de Pierre et Anne Marie, décédés tout deux en 1787 à Arquèves pourrait nous éclairer sur la transmission possible d’un nom. Mais les tables sont actuellement en cours de numérisation.
Notre enquête devra donc attendre encore quelques mois!
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